30 sept. 2009

Le hurlement du coyote

Au lever du soleil, je dus mon éveil au jappement criard d'un coyote. C'aurait pu être une vieille femme. Un bruit de chaudière niquée. Une rivière en crue. Ou le chant d'une sirène. Non, un coyotte. Ordinaire, le coyotte. Ordinaire, son jappement. Pas moins ordinaire, mon éveil.

Je dressai aussitôt les oreilles, que j'aimerais bien avoir pointues comme un chien. Juste un instant. Le temps de les dresser. Je tirai la langue pour humecter la sécheresse de mes lèvres gercées, à cause du froid dans l'appartement, je lappai une petite tasse de café bien serré, qui pour me tripoter? Déjà 8 heures. Bientôt plus tard. Putain.

Puis je décidai de passer mon récit au présent de l'indicatif (c'est moi qui décide, merde!).

Je veux bien qu'on me prenne pour un chien, puisque de toute façon je finis par ressembler à un chien (catégorie chien mou, très con et fidèle). Plus ou moins. Sur la durée. Je laisse faire. Pas le choix. Je n'aboie guère, je montre rarement les crocs (hormis 2 ou 3 carries à ma dentiste... quand j'y vais), on me caresse dans le sens du poil, c'est facile, on me gueule dessus, on me dit ce qu'il faut faire, je me rassieds. Oh qu'il est mignon tout plein le toutou. Jamais il n'osera demander une augmentation de salaire. Jamais il n'osera prendre la parole en public. Jamais.
J'aurais pu être un mouton, en fait. Avec de la laine, de longs cheveux, des bêlements stupides et on m'aurait dessiné pour ça. Et j'aurais été content en plus. Ah ouais.

A la niche!
J' y suis quand me réveille le jappement criard d'un coyotte qui m'a l'air perdu, en chaleur ou simplement affamé. Avec la faim, y'a pas moyen. Pas moyen d'attendre, direction le frigo. C'est tout droit, les pieds qui traînent sur le parquet. Alors? Des surgelés qui ressemblent à des croquettes. Nan. Un petit morceau de chocolat fera l'affaire. Je suis gourmand mais pas seulement. Ca chasse mes angoisses. C'est pas très efficace, car elles reviennent même quand il ne reste plus de chocolat, mes angoisses. Elles sont marrantes. Collantes. Ce n'est pas le moment de les confier, hein, y'a plus urgent, c'est d'aller aux chiottes.

Je lève la queue, je tire dessus, je marque mon territoire, j'asperge (la cuvette des chiottes), je secoue, je hume, je laisse tel quel. Ca m'excite. Pas vous? Un coyotte, ça l'exciterait. Je ne reçois que des chiennes chez moi. Je les prends par derrière. Déchirées dans des magasines, mais pas toujours. Je maîtrise. L'onanisme est ma seconde nature. Peut-être même la première. (pas la peine de répéter tout ça, hein). J'aime bien les scènes entre lesbiennes et les femmes matures, ouais. Et puis les trans aussi, c'est excitant, ouais. Bon, allez j'arrête, je commence à bander. Revenons au coyotte.

Au lever du soleil, je dus mon éveil au jappement criard d'un coyote... Un coyote en ville, c'est assez incongru. On me dit même qu'il n'y en a pas mais "on" est péremptoire, souvent. Aucun doute pourtant (là, je suis péremptoire), je peux reconnaître un coyote parmi une foule d'autres canidés. De la même manière que je me trompe rarement en apercevant le facteur:
-Tiens, c'est le facteur (Je me parle tout seul) qui dépose un colis.

-Tiens, c'est le facteur qui repart et il n'a plus le colis. (huum, mystère).
A moins de prendre un malin plaisir à mélanger les éléments du réel:
-Tiens, voilà la péniche qui coule sur un poireau. Si, si, une péniche, te dis-je! (Je me réponds à moi même). Sur un poireau, ouais! C'est quand meme mieux comme ça, non? (je n'attends pas de réponse).

(Vous aussi vous vous branlez? Enchanté. Vous êtes marié? Comme moi, nickel. Bon, attendez un instant, je termine mon récit).

Le coyote vit d'ordinaire en meute, ce qui n'est pas mon cas. Je suis un solitaire (à peu près, avec femme et enfant). Je ne sors qu'en cas de nécessité (par flemme, diraient d'autres personnes) et je sais limiter au maximum mes besoins (une fois que j'ai bien baisé, mangé et chié, faut pas abuser). On apprend vite à survivre avec les diffractions d'une psychose. Avec quoi? On appelle ça l'agoraphobie. Appelons-là puisqu'elle y tient. Qu'est-ce que c'est égotiste une psychose! Un coyote n'utilise pas de mots savants. Il aboie, il jappe, c'est criard mais cela semble signifier bien plus. Pour lui, en tout cas.

Pour moi, tout ça ne veut rien dire.
Ca fait du bien, quand même. Ca fait du bien, nom d'un chien.

2 commentaires:

Thierry Roquet a dit…

Je remets ici les commentaires d'époque (sur mon précédent blog):


Ludo K. (23.8.06)
Ce n'est pas mon préféré mais je vais pas pousser la pédale wa wa (j'aurais choisi le dingo d'australie ;-)
Hier en faisant du classement j'ai retrouvé un ancien texte où "je" me prends pour un chien, m'en vais le retoucher et le mettre sur mon blog.

Thierry R. (23.8.06)
Attends, je bouffe mes croquettes et je viens voir ton texte



dadibounette (6.9.06)
j'adore ton texte!toujours aussi absurde.comme une désillusion du temps qui passe.où vas tu chercher tt ça?



dadibounette (6.9.06)
je t'ai commenté ce texte à la place d'un autre.maintenant je te commente ce texte là...j'aime beaucoup.se mettre dans la peau d'un coyotte,il n'ya que toi pour faire ça!
donc si j'ai bien compris il se reveille humain c'est ça?


observateur (7.9.06)
je sais pas si tu observe le coyote et de ou tu es mais je trouve ton texte tres bien
moi j observe le coyote et ses assez special
ca ma aider a comprendre ton texte et a sentir l emotion
moi je suis du quebec
+


Thierry (29.9.06)
A Observateur: je n'ai jamais vu un coyotte en vrai, en chair et en os.

A dadibounette: bisous tout plein, mon trésor




A l'époque le texte ressemblait à ça:

Le hurlement du coyote

Au lever du soleil, je dus mon éveil au jappement criard d'un coyote. Je dressai aussitôt les oreilles, que j'ai pointues comme un chien. Je tirai la langue pour humecter la sécheresse de mes lèvres, je lappai une petite tasse de café bien serré...



Puis je décidai de passer mon récit au présent de l'indicatif. Voici ce que ça donne:
Je veux bien être un chien (méchant), aussi je finis par ressembler à un chien (très con ou fidèle). J'aboie, je montre les crocs (avec quelques carries), je bois, je bouffe des croquettes. Des surgelés qui ressemblent à des croquettes. Je lève la queue, je marque mon territoire, j'asperge (la cuvette des chiottes). Je ne reçois que des chiennes chez moi. Déchirées dans des magasines, mais pas toujours.

Un coyote en ville, c'est assez incongru. On me dit qu'il n'y en a pas (mais "on" est péremptoire, souvent). Aucun doute pourtant, je peux reconnaître un coyote parmi une foule d'autres canidés. De la même manière que je me trompe rarement en voyant le facteur de ma fenêtre:
-Tiens, voilà le facteur. (Je me parle tout seul).
A moins de prendre un malin plaisir à mélanger les éléments du réel:
-Tiens, voilà la péniche. Si, si, une péniche, te dis-je!
-Ah? (Je me réponds à moi même).

Le coyote vit d'ordinaire en meute, ce qui n'est pas mon cas. Je suis un solitaire. Je ne sors qu'en cas de nécessité et je sais limiter au maximum mes besoins. On apprend vite à survivre avec les diffractions d'une psychose. Un coyote n'utilise pas de mots savants. Il aboie, cela semble signifier bien plus. Je peux lécher, gémir sur la complexité du sens, ma perception n'en est pas plus aigue. Saloperie de migraine. Plus fidèle qu'un clébard!

Au lever du soleil, ce n'est pas un coyote mais un putain de réveil criard, complètement incongru (et je suis péremptoire), qui me hurle dessus.
Alors?
Alors, je ne vois vraiment pas pourquoi il n'y a pas de coyote en ville.

23.8.06

Thierry Roquet a dit…

Je mets également ici les commentaires gentiment reçus sur le site Fulgures pour ce texte dans sa nouvelle mouture, publiée sur ce blog-ci:


Hervé G. |2008-10-17)

Ouahou... Rythme d'enfer pour un enfer malgré tout sympathique... étrangement sympathique... si sympathique que, si on s'y penchait, on serait capable de tomber dedans... Bravo Ze Mob, c'est enlevé comme une mise à mort d'un torrero dans l'arène... je t'offre les oreilles et la queue... olé ?

;o)

Réponse de l'auteur :
Merci les gars pour vos lectures, pour vos comm. Vraiment sympa. Me suis marré en l'écrivant ;-)) Bonne idée que de l'illuster, Al, si t'as des idées, des photos que tu aurais prises, moi je suis ok. @+


Albert H. |2008-10-17)

ouaip, je confirme, du bon boulot, de bons décrochages, ce qui est vraiment bien et je t'en remercie, c'est qu'on se fait pas chier en lisant, et si tu l'illustrais ce texte ?


Réponse de l'auteur :

Merci les gars pour vos lectures, pour vos comm. Vraiment sympa. Me suis marré en l'écrivant ;-)) Bonne idée que de l'illuster, Al, si t'as des idées, des photos que tu aurais prises, moi je suis ok. @+



Hervé G. |2008-10-18)

L'idée d'illustrer est intéressante... surtout sur ton texte. La question est : avec quel genre de photo/dessin ?

Pour ma part, je verrais bien des bouts de photos sur le même thème, des morceaux d'appartement, des détails, des gros plan, poignée de porte, cuvette de chiottes, interrupteur... un cheminement en gros plans kaléidoscopiques... et vous, ça serait quoi ?

Vous savez, vous pouvez insérer des photos, si ça vous dit !

;o)


Réponse de l'auteur :

Bien vu, le Hervé, fort bien vu. J'attends mon fournisseur en photos, le prénommé Albert ;-))





Sylviane Kerivel |2008-11-07)

Hoouuuu !!!! C'est le hurlement d'une femelle coyote ... Elle s'apprête à marquer ton territoire. Fais gaffe, Mobert.
Peut-être pas nécessaire que je me répande en compliments ??
Et pourtant, j'aurais adoré que ça dure, que ça se prolonge, que ça file sa laine et son coton. Que ça ne finisse pas. Que ça m'retourne comme une galette de sarrasin. Que ça m'emporte et ne me ramène plus jamais !!
Le prochain chien que je prendrai, ça sera un coyote ;-))
J't'embrasse.


Réponse de l'auteur :

AAAAAh, j'ai entendu une femelle, dieu que c'est excitant une femelle de coyotte, ton houu m'a excité, aie, aie, aie ;-)) Merci Sylv'.



Albert H. |2008-10-26)

Dis-moi Mobert, tu l'as changé ce texte ?
J'ai trouvé ça super bien en deuxième lecture mais j'ai l'impression qu'il y a des trucs nouveaux.
P'tain je t'assure c'est du grand cette nouvelle. Bravo.
je me mets en quête de photos...


Réponse de l'auteur :

J'ai rien changé, c'est sans doute ta lecture qui a changé ;-)) Dès que t'as une photo, ou deux, ou trois, montre, parce que l'idée de l'illustrer est une super idée. Il me faut une photo de chien moche, famélique, une photo de cuvette de chiottes sale, une photo de mec qui n'a rien d'intéressant, une photo de meuble quelconque et puis voilà, si tu as tout ça en stock, je suis preneur ;-)) @+