12 juin 2015
3 juin 2015
A la Médiathèque du Nord !
Ce vendredi 05 juin, on viendra voir Greg & Simon, les deux jeunots du Pédalo Ivre, pour une lecture pleine de peps.
Tout ceci organisé avec maestria par François-Xavier Farine.
Tout ceci organisé avec maestria par François-Xavier Farine.
tous ceux que j'aime... (de Thierry Radière)
tous ceux que j’aime sont là
et je voudrais tellement être autrement
avec eux plus présent plus assis
moins sur le qui-vive des crépuscules
à rabâcher constamment des reproches
sur mon compte à propos de je ne sais
quoi d’impalpable et qui me démange
depuis que j’existe à rebours
et je voudrais tellement être autrement
avec eux plus présent plus assis
moins sur le qui-vive des crépuscules
à rabâcher constamment des reproches
sur mon compte à propos de je ne sais
quoi d’impalpable et qui me démange
depuis que j’existe à rebours
nous échangeons des paroles des rires
des idées des soupirs que je trouve beaux
sans jamais le dire que bien plus tard
à l’aurore sur une terrasse couverte de glycine
quand ils sont partis et que le téléphone
est coupé tous les deux nous nous parlons
de ce qui fait les jours heureux
recouchés l’un contre l’autre
sans nous en apercevoir au lit
des idées des soupirs que je trouve beaux
sans jamais le dire que bien plus tard
à l’aurore sur une terrasse couverte de glycine
quand ils sont partis et que le téléphone
est coupé tous les deux nous nous parlons
de ce qui fait les jours heureux
recouchés l’un contre l’autre
sans nous en apercevoir au lit
1 juin 2015
Une femme à gros seins qui court un marathon (d'Eric Dejaeger)
Lors d'une précédente note de lecture (Avril
2014), j'avais dit du recueil Ouvrez le gaz 30 minutes avant de craquer
l'allumette qu'il était jouissif.
Histoire de changer d'adjectif, disons que Une
femme à gros seins qui court un marathon d'Éric Dejaeger est absolument
délicieux !
Les deux recueils, parus chez Gros Textes la
même année, forment d'ailleurs une sorte de bilogie, le second pouvant
servir d'écho (ou de complément instrumental) au premier.
Une femme à gros seins qui court un marathon
Le titre, déjà !
Sonne comme du Bukowski.
Mais ça n'a finalement pas grand-chose à voir
avec le poivrot américain.
Hormis peut-être la liberté de ton, le langage
"familier", l'impression de naturel qui s'en dégage.
Une femme à gros seins qui court un marathon
C'est d'un amateur éclairé de Chimay bleue, fin
gourmet de la langue, vivant dans une sorte de Montana belge.
Ce recueil est à l'image du chevelu bien barbu
(pour celles et ceux qui le connaissent) : droit dans ses bottes,
chaleureux, finaud, drôle avec ce sens de l'observation, du détail qui font
mouche, de la chute qui fait rein, sans oublier quelques piques dûment lancées
à la face de ceux qui le méritent (riches capitalistes repus, curés et
religions, geeks des réseaux sociaux, des modes vestimentaires douteuses,
ceusses et ceusselles qui se plaignent à tout bout de champ) !
Ô lecteur parfois aussi interpellé dans ton trop
grand confort.
C'est aussi pour ça qu'on aime tant les
recueils d'Éric Dejaeger.
En tout cas celui-ci et quelques autres du même
acabit.
En le lisant, on a envie de faire pote avec Éric,
de boire un godet, deux godets, trois godets, de deviser, de se marrer,
d'ironiser, de fumer clopes ou cigarillos, de marcher quelques pas dans la
campagne en sa compagnie, d'observer la Lune faire un grrros bisou à la Terre.
Le recueil s'ouvre sur un absurde cruel autant
que jubilatoire, avec cette maison au bord du néant.
Puis Eric invente des mots. Pour la bonne
cause. Bannir les anglicismes. Pour que ce soit plus rythmé, plus vivant, plus
marrant.
Puis le poème qui donne le titre au recueil.
Excellentissime !
Puis les thèmes récurrents : la campagne, la
nature, les animaux (plus sauvages que domestiques), les femmes, des
souvenirs de voyage (Irlande, Hanovre), le bon vieux rock (Patty Smith,
Velours Souterrain de Lou Reed, the Pogues...), les cimetières dans son
jardin.
Puis "Le mot jaste" pour se consoler
de n'écrire pas à la perfection (je parle pour moi, of course).
Et la double petite bio finale.
On ne saurait passer sous silence la
sensibilité d'Éric, qui affleure par petites touches. Entre pudeur et
discrétion. Pour Molly d'Irlande, par exemple.
Le "je" n'est jamais trop mis en
avant. On ne sait d'ailleurs trop si ce "je" invente sa vie, nous la
raconte telle quelle, s'en détache, s'en moque… et peu importe.
Au final, on pourrait presque considérer ce
recueil comme un manuel de sagesse ou comment survivre en mode flegme so
british et zen dans une modernité tarabiscotée (sans biscottos).
Moi j'en ai fait mon livre de chevet actuel.
Un délicieux patchwork d’une soixantaine de
pages.
M'est avis qu'il s'agit-là d'un des recueils
les plus aboutis d'Éric Dejaeger. En terme d'équilibre et de dosage.
Pour l'occasion, Éric a fait les choses en
famille, entouré de ses deux filles : Sarah à la 1ère de couv' et Fanny pour la
4è de couv'.
On peut commander le recueil (8 euros) sur le site des Editions Gros Textes : https://sites.google.com/site/grostextes/publications-2014/dejaeger-eric-2
Le poids du monde (de Marlène Tissot)
Dense, noire, sensible, élégante, "Le poids du monde" de Marlène
Tissot, nouvelle de 20 pages parue l'an dernier aux Editions Lunatiques,
nous raconte la dérive psychologique d'un homme qui ne parvient plus, malgré
l'amour des siens - de sa femme et de ses deux enfants - à s'insérer ni dans la
société ni dans la vie tout simplement.
La seule charité, la seule compréhension qu'il
trouve l'espace d'un jour se trouve chez les forains.
Chômage, dettes, huissiers finissent par avoir
raison de lui.
A trop porter ainsi le poids du monde, il
s'imagine, pris dans l'implacable logique qui l'entraîne vers le fond, qu'un
sacrifice (le sien) est nécessaire pour permettre à sa femme Lili et à leurs
deux jeunes enfants de tout reprendre à zéro.
Il y a du David Goodis dans l'atmosphère du
récit.
Anti-héros sans espoir.
Il y a surtout du Marlène Tissot qui trace sa
route de poétesse, de romancière, de nouvelliste.
Le destin, même s'il n'est pas écrit avec
certitude, semble impossible à surmonter. Quoiqu'il fasse, le narrateur ne peut
que s'enfoncer davantage. Malgré la lumière, malgré la force de résistance de
Lili, malgré son amour pour elle. La force du sombre est plus tenace encore.
On suit donc les méandres de cet anti-héros,
entre monologues intérieurs et parties dialoguées, entre la honte, le mépris
des autres, le sentiment de n'être jamais à la hauteur, de n'être à sa place
nulle part. Pas même auprès des siens.
Ce personnage est un anonyme parmi tant
d'autres ; ça pourrait être vous, ça pourrait être moi, et on pourrait
forcément se reconnaître en lui, en tout cas sur de nombreux aspects…
Le désespoir n'a pas de nom, pas de prénom.
Il est juste porté par la lumineuse subtilité
de l'écriture de Marlène Tissot.
On peut commander le recueil (4 euros) sur le site des Editions Lunatiques : http://www.editions-lunatique.com/#!le-poids-du-monde/c20pf
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