12 juin 2017

5 trucs brefs parce que c'est lundi

L’ermite

C’est un homme qui  ne sort quasiment pas de chez lui. N’y reçoit jamais personne. Ne travaille plus depuis des lustres. Subsiste par miracle. Se lave rarement. N’en éprouve aucun besoin. Garde les mêmes habits, puants, d’un jour à l’autre. Parfois, nu tout simplement. Sa barbe est longue, hirsute et sale. Il ouvre grand les fenêtres uniquement la nuit. L’homme se tient alors assis sur une chaise bancale. A la lumière faiblarde et vacillante d’une lampe de chevet, il aperçoit quelques insectes entrer et lui tenir compagnie. Il les regarde avec une certaine tendresse. Il regarde chaque chose avec une certaine tendresse. Et chaque fois qu’il a faim, il s’excuse d’abord puis se sert sur les murs de chez lui pour un moucheron, une araignée, un moustique, un papillon, un cafard, qu’il croque avec amour ou gobe d’un coup sec.


Une plume ne prend pas de poids
Elle ne veut pas grossir. Ni d’un gramme, ni d’un milligramme. Son poids est une obsession. Un drame, un pas vers la folie. Elle ne mange quasiment rien et ce qu’elle mange, soit elle le vomit, soit elle le pèse pour en déterminer et en calculer la moindre incidence, la moindre micro-calorie. Quand on lui dit qu’elle a perdu quelques kilos, qu’elle maigrit à vue d’œil, elle n’en croit pas un mot. « Vous mentez ! » lance-t-elle, furieuse. Des années à vivre comme ça. Des années à se nourrir à peine. Elle ne changea pas même d’avis quand, un soir, elle parvint à se faufiler sans effort sous la porte de sa chambre. Depuis, elle s’endort, là où le vent la porte, là où le vent la pose, sans jamais plus froisser les draps.


Et l’histoire continue
Un homme dépressif rencontra une femme dépressive. Ils s’aimèrent de façon tout-à-fait dépressive. Ensemble, ils eurent des enfants dépressifs. Qui se suicidèrent tous les uns après les autres. Ce qui rendit l’homme encore plus dépressif, sa femme encore plus dépressive. L’homme se suicida. Peu après, sa femme en fit autant. L’homme laissa derrière lui quelques poèmes particulièrement dépressifs. Qui aidèrent peut-être, à leur façon, certains lecteurs dépressifs, certaines lectrices dépressives, à en finir également une bonne fois pour toutes.


Quand un inconnu vient vous voir
Dès demain, j’entame ma tournée d’adieux. Je saluerai d’abord la boulangère, ses pâtisseries, l’épicier arabe, le coiffeur, la pharmacienne, le moniteur de l’auto-école, le poivrot du comptoir, la bibliothécaire qui met mes recueils en avant, le serveur du restaurant, les clients qui profitent de leur pause-déjeuner, les caissières de la supérette, même les plus antipathiques, sans oublier les chiens qui se soulagent près des réverbères et les gras pigeons à nos pieds. Puis j’irai saluer un à un les vingt-huit mille et quelques habitants restants de la ville. Je ne veux oublier personne.


What the fuck ?
J’ai roulé jour et nuit, sans m’arrêter. J’ai dû rouler trop loin et sortir des ornières. De ma vitre, je n’aperçois plus la route. Plus les arbres. Juste quelques étoiles, une planète inhabitée et un spationaute, à la dérive dans l’espace, qui me fait un signe de la main.




11 juin 2017

Quelques aphorismes d'un dimanche matin ensoleillé, torse nu, avec béquille

De la légèreté
Puis-je poser une question lourde de sens sur ton épaule et la laisser s’envoler comme un papillon ?


La tempête récoltée
Qui s’aime levant, se déteste couchant.


On verra ça bien plus tard
Qui sait surseoir peut s’asseoir. Jusqu’au soir.


Pour le plaisir
Le crime ne paie pas ; c’est dire si certains font ça de façon bénévole et tout-à-fait désintéressée.


Canicule et humeur 
Nous avons tous des zones d’ombre pour nous abriter de la chaleur.


Drogue dure
La force des habitudes est d’anesthésier les sentiments extrêmes. Comme une injection faite à heure fixe. Un shoot à la vie normée.


A trop fumer
Je souffre d’une maladie chronicotine.


Terre nourricière
Chaque matin, prendre un grand bol d’air avec un nuage de lait.


Question d’angles
Vue de très loin, la Terre paraît minuscule. Il en est de même avec dieu.


Halte-là !
Nous filons déjà droit vers la mort. Nul besoin de nous y pousser davantage.


Portrait
Je suis un non criminel endurci.


J’aime Richard Brautigan mais...
Ce qui me sépare le plus de lui, pour l’instant, en dehors du talent, c’est son suicide.




Un superbe collier de perles de Perrin Langda pour sa bien-aimée

Collier de poèmes
pour Tiphaine

tes yeux en amande
tes formes tendres comme de la frangipane
ta croûte craquante de galette bien dorée

quand je passe
mes ongles
dans tes cheveux noirs
comme du vinyle
j’ai presque l’impression
d’être John Lennon
qui vient de rencontrer
Yoko Ono

il y a assez d’or sur ta peau
pour tous les pauvres
mais je le garderai pour
moi

l’alignement
de tes grains
de beauté
est tous les jours
de bon augure
pour qui
s’y aligne

tiens
un papillon
s’est posé
sur la boule
de ton nez
comme une
paire de
lunettes

jolie carrosserie
si l’on considère
tes lobes d’oreilles
qui rebiquent
comme les deux ailerons
d’une bagnole tunée

ne t’inquiète pas poupée
je suis là pour te protéger
de mes angoisses

ton souffle sur les dunes des Badlands
une caresse sur le ventre du Nevada
main au fond des forêts du Yellowstone Park
je léchais les gorges roses du Grand Canyon
l’Empire State Building se dressait au loin
Old Faithful se réveillait
du souvenir d’un road trip
sur ton
corps

c’est un peu comme si
nous nous connaissions
depuis la nuit des temps
comme si j’avais tellement
écouté tes histoires
imaginé tes souvenirs
ressenti tes peines
réfléchi à tes pensées
qu’elles étaient même
devenues les miennes
comme si les mots
« tu es une partie
de moi-même »
n’étaient pas qu’une
simple expression

je me suis
toujours
senti bien
près de toi
tandis que
tu tricotais
en toute
tranquillité
l’écharpe
de notre vie
avec le fil
des jours

petite graine de pollen d’hibiscus
j’ai eu un sacré coup de pot
le vent t’a fait traverser deux océans
pour te déposer dans mes lorraines

quand tu me regardes
avec les yeux ronds
d’une petite fille étonnée
l’arc de tes paupières
tire une flèche invisible
tout droit dans le cœur
du petit garçon que
je ne pensais plus être

(extraits d’un petit recueil de 34 poèmes
écrits pour les 34 ans d'une certaine personne)
Perrin Langda

Lecture avec Jim Flahaut à Hellemmes ce Samedi 17 Juin à 19h

Sur invitation de l'irremplaçable FX Farine, Jean-Marc Flahaut & moi ferons une lecture de nos textes dans un bistrot chaleureux "Le Polder", à Hellemmes, près de Lille.
Lecture prévue de 19h à 20h environ.

Si vous êtes dans le coin, ce sera plaisir de vous y voir.
Vous me reconnaîtrez : j'aurai une béquille pour ma jambe droite.





10 juin 2017

Johnny Flynn & Laura Marling - The Water





All that I have is a river
The river is always my home
Lord, take me away
For I just cannot stay
Or I'll sink in my skin and my bones

The water sustains me without even trying
The water can't drown me, I'm done
With my dying

Please help me build a small boat
One that'll ride on the flow
Where the river runs deep
And the larger fish creep
I'm glad of what keeps me afloat

The water sustains me without even trying
The water can't drown me, I'm done
With my dying

Now deeper the water I sail
And faster the current I'm in
That each night brings the stars
And the song in my heart
Is a tune for the journeyman's tale

The water sustains me without even trying
The water can't drown me, I'm done
With my dying

Now the land that I knew is a dream
And the line on the distance grows faint
So wide is my river
The horizon a sliver
The artist has run out of paint

Where the blue of the sea meets the sky
And the big yellow sun leads me home
I'm everywhere now
The way is a vow
To the wind of each breath by and by
The water sustains me without even trying
The water can't drown me, I'm done
With my dying