29 janv. 2010

Rentrer chez soi

Le taxi roule à vive allure sur le périphérique. Une pluie battante à faire danser les essuie-glaces. La vitre collée contre le front, à l'arrière, ça donne envie de chanter quelque chose de triste et lancinant. Ou de fermer les yeux. Le taxi quitte le périphérique, s'engage dans une avenue, ralentit, s'arrête au feu rouge. Le clignotant tic tac tic tac indique qu'il va tourner à gauche, vers la proche banlieue. Encore une petite route ou deux et le monde autour, dans le matin à peine levé, se remplit comme une poche de sang dans un sac légèrement crevé. L'averse n'a pas cessé, les révèrbères se sont éteints, les premiers pas, les premiers bruits, ombres, silhouettes, poubelles, tout y est à sa place. Et d'une certaine manière, c'est assez rassurant.
Il y a longtemps. Un jardin à l'écart de la ville. Les fleurs multicolores. Les abeilles. Les rires des enfants, la joie toute simple des parents. Leur colère quand il fallait. Il y a longtemps, une maison entourée de haies mal taillées. D'une cloture en plastique blanc. Une petite route légèrement montante. La poussière, les courses en vélo, le chemin de l'école. Il y a longtemps que je n'y avais plus pensé.
Il regarde l'heure. S'étonne de ne voir personne. Fais quelques pas à droite, à gauche. Contourne les monuments. Lis les inscriptions. Trouve une petite pièce de monnaie par terre. S'assied sur un banc. Mange un croissant. Ouvre un carnet. Rédige quelques mots. Regarde l'heure. Se lève. Marche, s'enfonce dans la nuit et disparaît. Sous le crachin d'hiver.

28 janv. 2010

Changement de décor

J'ai longtemps vécu dans le ventre de la terre, m'enfonçant profondément dans ses entrailles, rampant dans des galeries creusées à mains nues, griffées de gel et de chaleur. J'ai rencontré des hommes, des femmes qui, comme moi, cherchaient l'abri, la solitude, un endroit à part ou l'effort physique et la respiration rare empêchaient toute pensée, toute méditation sur le destin, sur soi, sur les autres, ou le jour, la nuit se confondaient, ou seule la survie importait.
A présent que je suis sorti du ventre de la terre, les migraines et l'inaction sont de mise, entre quatre murs confortables.

27 janv. 2010

En vrac dans les poches de mon jean

L'invincible armada et l'amiral Nelson
La chaise électrique de la prison de Fort Worth
Le Machu Pichu le Rio Grande le Brahmapoutre
Les vierges du Paradis les putains des villes
Une tortue des Galapagos (roulée en boule)
Un paquet de clopes un briquet mes clés
Mes papiers un peu de monnaie
Je crois n'avoir rien oublié
En m'habillant ce matin.
Un bouton sur la lèvre. Une langue sur la lèvre. Les joues rouge. Un grand sourire. Un peu gêné. Des lunettes. Deux yeux fixes. Brillants. C'est impressionnant, me dit-elle. Pas un mot plus haut que l'autre. Qu'est-ce qui est impressionnant? lui demandé-je. Le miroir en face. Le serveur. La rue, les trottoirs, les chiens. Le froid, la couleur du ciel. Le fond de ton regard me répond-elle. Une bière pression. Un café avec deux sucres. S'il vous plaît. Clientes, clients, passants, passantes. Le fond de mon regard? Le fond du verre. Le fond du trou. Le fond du fond. Oui, le fond noir de ton regard, ça fait peur. Un étonnement, un faux. Un sourire, une esquisse. Un geste tendre, une main. C'est mieux comme ça?

Chaque Chos'e en son temps

Revue animée magistralement par Maître Henry Chiparlart, qui nous enrichit tous, du coup, ici: Le Numéro 2

On y retrouve des signatures amies. Sur 158 pages.
Le prochain numéro devrait avoisinner les 400 pages ;-))
L'immeuble ne s'écroule pas non il est en train de lentement tomber sur le côté le squelette fatigué malade une dent pourrie qui fait mal et si ce n'était que ça les fenêtres ne s'ouvrent plus les portes sont coincées les voix ne portent pas elles rebondissent inlassablement les voix sont des petites balles en plastique lancées contre les bétons froids à chaque étage sans qu'on sache ni d'ou ça vient ni à quoi ça rime.
comme un jeu qui aurait mal tourné un jeu de rôles un jeu de dupes qui aurait mal tourné un jeu de patience et d'attente quand l'un des joueurs aurait du mal à s'avouer vaincu persisterait à jouer à tourner sur lui-même un jeu qui aurait mal fini sans plus personne en face
il pourrait suivre la main son ombre vers le plafond celle qui bat la mesure d'un monde réel sans accroc il pourrait se sentir présent à cet instant distinguer des souvenirs les écorcher s'arracher des larmes des bouts de peau mais rien n'y fait la main n'est pas la sienne n'est à personne
A la fenêtre
un visage

un visage
un peu flou

un peu triste
un peu tout

et plus rien
d'un seul coup
Saleté de froid!
givre! gerçures! vent sec!
et puis tout le reste!

je veux dormir tranquille
& nu
sans haine & sans effort

j'aimerais un rêve qui prenne forme
je ne sais pas
s'il se trouve encore en moi
NOUS SOMMES ATTABLES QUELQUE PART
et nous mangeons sans même penser
un instant
que tout ceci
n'est que le fruit de notre imagination
qu'il n'y a plus rien dans nos assiettes
dans nos estomacs
dans nos artères
dans nos yeux
pressés qu'ils sont d'en découdre
avec les fils de l'invisible
pantomime
il sont là toujours là
derrière le rideau
derrière les corps tendus
derrière quelque chose
de plus opaque
qu'une route à peine défrichée

16 janv. 2010

Version brûlée au chalumeau

Le jour n'est pas encore levé sur les hautes tours ombres grand-guignolesques elle se dirige vers chez elle à pas feutrés c'est pourtant là qu'on finira bien assez tôt par lui trouver une autre piaule pour la nuit éternelle maculée de sexe de coups et de gorges tranchées.

Au plus proche ou pas

Quand elle a lu mon poème
elle a marqué un temps d'hésitation
puis m'a demandé si je parlais bien
d'elle & moi et si c'était
toujours ainsi
dans mes poèmes
parce que dans la vie
m'a t'elle dit
elle trouvait
que ça ne ressemblait
pas vraiment à ça.

Version fignolée au cutter

Le jour n'est pas encore levé à l'angle de la 18è rue près des hautes tours délabrées ombres grand-guignolesques dans un ciel de chiffon elle se dirige vers SubStreet Bld vers chez elle à faire le dos rond sur tout un catalogue d'insultes entendues ici ou là elle a de l'argent sur elle dans son sac à main après quelques passes avec des clients pas très regardants sur l'hygiène elle n'est plus très regardante sur sa façon de gagner son fric on est quitte leur dit-elle mais comment dire c'est dans la noirceur des villes grisées de sexe de coups et de gorges tranchées qu'on s'arrangera pour lui trouver une petite piaule pour la nuit éternelle en guise de conclusion hâtive.

15 janv. 2010

Il a dormi dans l'après-midi
Il a pissé pété bu trois cafés fumé des clopes mangé un peu
Il a regardé le temps qu'il faisait dehors
Il a noté sur un bout de papier la liste des courses
Il a vérifié qu'il lui restait un peu de monnaie
Il a pris son peigne pour plaquer une mèche rebelle
et grasse contre les autres cheveux gras aussi
Il a enfilé sa vieille veste en cuir noir élimé
Il s'est regardé une dernière fois dans la glace
& il a pensé que si un jour quelqu'un lui
demandait des comptes
il ne saurait pas quoi répondre.

Ce petit jeu l'amuse

Assise seule à une table du resto bruyant
pendant sa pause-déjeuner
elle essaie d'imaginer
ce que donneraient les discussions
si on intervertissait
les voix des uns avec
celles des autres
pour mieux les faire coller
aux réalités supposées
des visages des physionomies
et c'est un peu sa façon à elle
de remettre à leur place
l'ordre et l'absurdité du monde.

14 janv. 2010

Et y'aura pas grand-monde pour te sortir de là (Version 1)

Le jour n'est pas encore levé à l'angle de la 18è rue près des hautes tours délabrées ombres grand-guignolesques dans un ciel de chiffon ce n'est pas seulement la dope ni des noms d'oiseau du genre Sale camée sale pute bien qu'il en soit ainsi quand on la dévisage ainsi quand on lui parle elle se dirige vers SubStreet Bld à faire le dos rond sur tout ce catalogue d'insultes chez un petit dealer habituel de quoi trouver pour pas trop cher elle marche vite nerveusement scotchée à ce qu'elle veut une dose suffisante pour avant le matin une dose pour avant la crise incontrôlable du manque elle a de l'argent sur elle son sac à main contient quelques dollars canadiens après quelques passes dans quelques bagnoles en banlieue avec des clients pas très regardants sur l'hygiène elle n'est plus très regardante sur sa façon de gagner son fric on est quitte leur dit-elle alors juste ça en attendant mieux juste ça ça ça avant de décrocher peut-être un jour c'est pas sûr mais comment dire c'est dans la noirceur des villes quand tous les méchants chats sont gris de sexe de coups et de gorges tranchées qu'on s'arrangera pour lui trouver une petite piaule pour la nuit éternelle en guise de conclusion hâtive.

Evidences

L'oiseau qui fait son nid
s'en fout de savoir
s'il est solvable ou pas
.
Le sang qui coule trop vite
provoque une inondation
irrémédiable
.
Courir la tête à l'envers
permet d'utiliser
ses pieds à autre chose
.
Le silence des espaces
infinis vaut bien
les hurlements d'un chiard

Strip

La strip-teaseuse
ondule son corps sur la
barre en fer
et l'homme fasciné qui lui
glisse un billet
susurre qu'il reviendra
demain
pour elle

Son regard pathétique





Le vieux chat miaule
se laisse caresser
sous la chaise
pour un peu de lait

Un petit poème foireux

J'ai écrit un poème sur un bout de papier
chiffonné dans ma poche
avec des mots de tous les jours
des sensations de tous les jours
et quand je l'ai relu
une ou deux semaines plus tard
le poème avait un air de déjà-vu
qui ne rimait à pas grand-chose
sous ses airs de fausses
évidences
J'ai déchiré le papier en tout petits
morceaux
que j'ai dispersés aux vents de
l'oubli dans la rue
et j'ai demandé à mon poème
de ne jamais plus revenir
sous cette forme-là
s'il n'avait rien d'autre
à me dire.

Celui qui voulait la mort de la lune

Il s'était figuré que la lune était la cause de ses mauvais sommeils, de ses cauchemars qui le réveillaient, chaque fois, en sueur, agité à l'extrême et dès lors s'asseyait sur le bord de son lit, sans parvenir à se rendormir, attendant la lente levée du jour. Les heures ne passaient pas bien vite. Elles étaient propices à de sombres suggestions. Il s'imaginait des sortilèges venus de là-haut. Il fixait l'astre coupable qui dispensait un fluide étrange, selon lui, une pâle lumière malsaine sur les images mentales récurrentes de ses nuits. Les souvenirs l'obsédaient, parfois s'estompaient, toujours revenaient: il était en fait incapable de penser à autre chose durablement, l'esprit tourmenté de haines et de fureurs.
Et à force de la fixer ainsi, ses yeux étaient devenus deux satellites de la lune.
Il n'avait trouvé d'autre alternative que de les crever en y enfonçant une lame aiguisée comme un mauvais pressentiment.
Loin de le calmer, ce geste n'avait fait qu'empirer son état: même aveugle, il n'avait de cesse de voir la lune partout en lui, à l'intérieur de lui, nichée dans chaque coin, prête à jaillir de son cerveau pour le narguer... Il se sentait épié, possédé, aspiré, respiré.
Il ne souhaitait plus dès lors que la mort de la lune, une mort définitive, hors du ciel, hors du temps, hors de tout...

13 janv. 2010

Le couple idéal

Un piano à queue
invite à s'asseoir
une femme à barbe (si possible transexuelle)
.
.
Un clavecin plat
ne veut jouer que
du Gainsbourg
.
.
Simple hypothèse:
un thésard +
un synthétiseur

Mon poème d’aujourd’hui sera sur répondeur

Vous avez un message.
Message reçu aujourd’hui à 22h34.
T’es là? Réponds s'il te plaît... oui s'il te plaît décroche... je suis à bout... Une cigarette consumée entre tes doigts... l'amour n'est pas un laboratoire... SALAUD ORDURE CONNARD...
Supprimez le message taper 1
Réécoutez le message taper 2
T’es là? Réponds s'il te plaît... oui s'il te plaît décroche... je suis à bout... Une cigarette consumée entre tes doigts... l'amour n'est pas un laboratoire... SALAUD ORDURE CONNARD...
Supprimez le message taper 1
Réécoutez le message taper 2
T’es là? Réponds s'il te plaît... oui s'il te plaît décroche... je suis à bout... Une cigarette consumée entre tes doigts... l'amour n'est pas un laboratoire... SALAUD ORDURE CONNARD...

Mon poème d’aujourd’hui sera sur répondeur.
En prise directe.
Entre sanglots, colère et désespoir.
Et j’ai bien tout noté,
tout recopié, oui
ce qui fera un
putain de poème comme
ça.

Humeurs

J’ai l’humeur quarantaine
La main sur ma bedaine
Me déprimant fredaines
De tout de rien la haine

J’ai l’humeur d’isoloir
Penser ce qu'il faudrait vouloir
Boire à mon vide aux monstres de foire
Dans mon lit mon boudoir

J’ai l’humeur syncopée
Nuit et jour décalés
Envie de me branler
Un film à la télé?

Deux courants d'air

L'homme courant d'air
surgi d'entre deux portes
est reparti souffler ailleurs
.
La femme courant d'air
lui a t'elle fait l'amour
entre deux bises légères?

Mochetés

Les rideaux sont tirés
les stores abaissés
la solitude dans la pénombre
.
La neige accrochée aux toits
c'est un peu de sucre vanillé
sur leur austèrité
.
Marcher sur le trottoir gliss
ant
surtout ne pas tomb
eeeer

12 janv. 2010

L'air du large

Nous sommes de grands voyageurs. Intérieurs.
Il n'y a pas la moindre toile d'araignée sur nos pensées. Nettoyées, cirées, dépoussiérées, époussettées. Nous amenons des pièces de rechange pour lustrer l'endroit. Ainsi faits de bric et de broc avec le temps, nous espérons tenir l'usure et la rouille.
Nous sommes parfois surpris par l'éphéméride au retour d'un séjour en nous-mêmes.
Ainsi partis un lundi, sommes revenus un vendredi.
Sans nous apercevoir de rien.
Cela nous a fait tout un tas d'histoires, des bribes plutôt, à nous raconter ensuite.
C'est comme une drogue. Dure. Excitante.
Nous avons scruté nos cerveaux de fond en comble. De comble en fond.
La menace est permanente. D' y rester, d'y vomir, de s'y trouver beau. De s'y perdre. De n'y rien comprendre.
Quand nous nous sentons trop en danger, nous changeons d'angle: elle scrute mon cerveau, je scrute le sien. Du bout d'un oeil. Prudemment.
Et quand l'oeil avertit enfin le second de le suivre, l'aventure recommence, baisant la perspective de comparer le fond de l'un avec le comble de l'autre.
Ce qui provoque parfois malentendus, engueulades et reproches.
Mais ce n'est rien.
Les vagues de la vie sont plus terribles, quand on s'y sent, tout seul, mal préparé.

Ainsi nous nous sauvons mutuellement de la noyade et c'est bien là ce qui compte.

Cap de bonne espérance

Nous passerons l'estuaire
de la mélancolie
à la nage
en espérant que les courants
ne nous emportent pas
au loin

Chinaski




Le nom du groupe est un hommage à Bukowski et on le comprend mieux lorsque l'on écoute cet album où la richesse des textes, ces petites tranches de vie, plutôt pessimistes, nous emmène de petits bars en soirées. Les sons sont mélangés (instruments et ordinateur), sur fond de mélancolie, le chant est parfois parlé, on peut retrouver des intonations de Houellebecq, Bashung, Miossec. ..(Source: cdmail.fr).
Groupe niçois.
L'album "le fiel peut attendre" (cf photo): excellent. On l'écoute très souvent en bagnole.
J'ai beaucoup moins aimé l'album "toilette intime".

Ils font si bien semblants

Dans la grisaille
fraîche d'un matin
comme un autre
ils continuent de vivre
leur vie avec la même
application que les jours
précédents et c'est à peine
si on peut soupçonner
leur dépendance
accrue aux anxiolytiques
aux anti-dépresseurs.

Face à face

Dans la salle d'attente
du cabinet médical
la vieille femme tousse
crache dans un mouchoir jetable
mais qu'elle tient fermement en mains
elle me regarde avec insistance
à certains moments
de l'air de dire
tu vois comme je souffre?
ou bien
T'aimerais peut-être bien
me voir crever là
devant toi, hein?
alors
je détourne les yeux
je regarde les murs le poster
d'un film de Buster Keaton
les horaires les tarifs des
consultations la porte d'entrée
du cabinet le sapin de Noel encore là
je tripote mon portable
mais rien n'y fait
toujours la vieille femme tousse
crache émet des grognements
rausques lancinants
et quand la doctoresse appelle enfin
mon nom
je sens comme un
soulagement inoui
à l'idée de lui annoncer que je
n'ai pas grand-chose
en fin de compte

11 janv. 2010

Le sésame

J'ai appelé la boîte d'intérim et
un enregistrement vocal m'a demandé de taper:
1 pour un emploi légal
2 pour un emploi illégal mais lucratif
J'ai tapé 2 évidemment
la voix m'a demandé d'ensuite taper
1 si vous n'avez peur de rien
2 si vous êtes une poule mouillée
j'ai réfléchi un instant et la voix a dit
désolé je n'ai pas enregistré votre choix
j'ai répondu ta gueule, je réfléchis
et puis j'ai tapé 2
par sincérité
La voix a fait
il n'y a rien pour vous et m'a réorientée vers l'accueil
1 pour un emploi légal
2 pour un emploi illégal mais lucratif

J'ai tapé 1 cette fois
elle m'a proposé ceci ensuite:
1 pour un boulot merdique mais c'est la crise
2 pour un boulot un peu moins merdique mais c'est pas tellement mieux et il faut quelques compétences
3 repassez dans 6 mois
J'ai hésité et j'ai encore eu droit à ça:
désolé je n'ai pas enregistré votre choix
J'ai tapé 1 pour aller vite
aussi par sincérité
la voix a conclu
très bien et
elle m'a demandé
de passer à l'agence avec mon CV
demain matin sans faute
en me filant un code
que j'ai noté sur un post-it
et qui sera mon sésame pour
une vie meilleure.

Un peu comme les marins

O ciel
quand tu pleus si fort,
pourquoi
ne portes-tu pas de ciré jaune
avec capuche?

C'est beau la vie

Nous vivons dans un bordel permanent. Comme aucun de nous ne se décide à descendre les poubelles ni à faire la vaisselle, les piles sales, encombrantes, puantes s'amoncèlent dans notre petit appartement, qui tient plus de la déchetterie que du nid douillet. Il reste peu de place pour les sentiments, nous ne distinguons même plus la moquette, c'est dire. Mais l'habitude aide à supporter ce qui peut déranger. Les cafards et les mouches, par exemple.
Et, par une sorte de magie du hasard, nous avons reconnu, en train de glisser d'un sac plastique, le reste du tajine aux pruneaux pour fêter son anniversaire, il y a quelques mois, déjà.
Emus, nous nous sommes glissés sous les draps, nous sommes déshabillés et avons fait l'amour comme aux premiers jours. En oubliant quelques instants toute la pourriture du monde.

Dans le plus simple appareil

Mise sur son 31
pour notre anniversaire
de rencontre
j'ai égréné le compte à
rebours de trente jusqu'à
zéro
pour la mettre à
nue.

Plus ou moins

Il a monté les étages
en colimaçon
qui mènent chez lui
et dans le long couloir du 3è étage
ça fait maintenant
plusieurs heures qu'il déambule
sans trouver aucune porte
sans rencontrer personne
se perdant dans un labyrinthe
de courbes et de
probabilités exponentielles
quand il tente de revenir
sur ses pas
désespéré
le long couloir n'est déjà plus
qu'un avant-goût
prononcé
de plus ou moins l'infini

10 janv. 2010

Ca marche pas

Je me suis assis timidement
face à elle
j'ai parlé d'une voix à peine audible
elle m'a demandé de répéter parce qu'elle
n'avait strictement rien compris
je lui ai glissé mon CV en douce
je me suis raclé la gorge
et
j'ai hurlé comme un porc qu'on égorge: JE CHERCHE UN EMPLOI
elle m'a semblée extrêmement attentive
a ouvert grand les yeux
MAIS SURTOUT PAS
UN TRUC TROP CON OK?
elle était tétanisée
OK?
elle ne bougeait plus
du tout
ALORS?
et j'ai bien senti à son regard vide
qu'elle n'aurait
rien pour moi aujourd'hui.

Ouf!

J'ai vu dans le ciel
un avion deux avions trois avions
qui larguaient des bombes
nucléaires
fort heureusement
c'était dans un vieux film de guerre
à la télé

Question

-Je ne sais pas trop quoi faire de ma vie.
-Moi non plus.
-Et tu crois que la vie sait ce qu'elle veut faire de nous?
-J'en sais rien, c'est flippant.

Tableau

Dans l'entrée de l'appartement, il y a un petit tableau d'un peintre anonyme qui représente un paysage assez ordinaire: un arbre fruitier et un oiseau aux vives couleurs perché dessus. Un souvenir de vacances en Bretagne si ma mémoire est bonne. Le reste de l'appartement est à l'image de ce tableau: anonyme et ordinaire. Il y a notre présence quotidienne, passée, présente, évidemment, mais le décor manque de cachet; il est terne et sans invention. Je me demande si nous ne serions pas, à notre tour, coincés dans le paysage d'un peintre anonyme.

Ce n'est pas forcément fini

Dans le salon, je passe l'aspirateur et il aspire tellement bien qu'il engloutit tout net le canapé, la table basse, l'armoire à vaisselle et si je l'avais laissé faire, il aurait avalé aussi ma femme, ma fille, qui hurlaient, l'immeuble entier, peut-être. Il m'a foutu la frousse, je l'arrête donc, je le débranche, par précaution. Remisé au placard, je l'entends gargouiller et émettre un rot, un énorme rot, un bruit d'outre-tombe à faire pâlir d'envie les kamikazes.
En espérant qu'il ne se déchenche pas tout seul, nous nous tenons sur nos gardes, désormais.

9 janv. 2010

A woman in rage

Dégouline
le sang
sur tes lèvres
depuis que tu as
bouffé le chien
des voisins
qui ne cessait d'aboyer
la nuit
pour un oui
pour un non
Essuie-toi, ma chérie, c'est fini.

Erreur stratégique

J'ai le sexe
complètement gelé
je n'aurais pas dû pisser
sur le pas de la porte
pour faire
fondre la neige.

Effet boule de neige

Il fait si froid dehors
que les moindres bouts de phrases
forment des congères au
bord des lèvres.

Méches folles sous la neige

Pluie de flocons
comme mèches volantes
sur crâne dégarni.

Formule chimique

Frottez longuement
deux corps l'un contre l'autre
et vous obtiendrez
un beau feu de lit

Scène de la neige fraîche

Stoique
assis à même un siège pliable
sous un auvent de fortune
balayé par le vent
il ne vend pas beaucoup de marrons chauds
mais il se réchauffe
les mains les pieds près du bidon
de mazout
qui lui sert de brasero.

8 janv. 2010

Prête-t'on attention à une telle démarche?

J'étais dans cette rue, en bas de chez moi, à me frayer un chemin, un trou de souris, parmi les gens, rasant presque les murs, tête baissée, les yeux rivés sur le bitume, sur mes grolles élimées, sur les merdes de clébards, à moitié enfouis dans la boue des trottoirs, sur n'importe quoi qui me permette de fuir tous ces regards, réels ou supposés, et de tenir le coup pour aller là ou je devais aller.
Comme un bout de viande qui brûlerait vif au micro-ondes, je ne savais plus trop comment exposer le plus simplement du monde ma présence anodine à la rue.
Ca devait se voir.

Heureusement, j'ai changé depuis. Au moins, en partie.
Et puis: on a changé de micro-ondes...

Dévaler les pistes par mauvais temps

Il neige pas mal ici et là en ce moment, on dérape vers les à-côtés. On se cogne contre les parois. On marche comme des guignols sans public à conquérir. Ce n'est pas si douloureux. Mais déstabilisant. Du genre:
Quelque chose d'une pensée organique et d'involontaire à la fois.

Au beau milieu des flocons, tu me regardes, plantée sans trop savoir quoi faire, entre l'envie de me rejoindre et celle de m'éviter, au passage de me bousculer. Avec ta sensibilité. Et la peur que le pire n'arrive. Ensuite:

On trouve un coin tranquille, on se réchauffe comme on peut, après paroles communes, de circonstance, apaisantes, on fait l'amour aussi, en n'insistant pas trop sur la valeur des choses, l'incidence du réel, le noeud du problème. On est:

Un peu paumés, juste ce qu'il faut, pour ne pas perdre pied et glisser sur les sentiers battus d'avance. L'esquive a ses limites, dis-tu, alors:

Tu préconises de ne plus porter nos sales manies comme de vieux oripeaux, de trouver des habits neufs. D'essayer au moins, de voir ce que ça donne. Et ce n'est plus la peine d'en faire une maladie sous le prétexte:

Qu'il neige pas mal ici et là en ce moment...

7 janv. 2010

Drague morbide

-Vous avez de beaux yeux mademoiselle.
-Ah? je trouve mon regard mort.
-Nan, pas du tout. Vous avez un charme fou. Vous habitez chez vos parents?
-Mes parents sont morts.
-Oups, désolé. Vous habitez chez une amie, un ami peut-être?
-Tous mes amis, toutes mes amies sont morts.
-C'est triste, et vous avez encore de la famille?
-Toute ma famille est morte. On danse?
-Heu, je ne sais pas... je ne sais pas bien danser...
-Je ne vous plais plus? Allez, laissez-vous faire, ce sera là votre dernière danse...

Pepe

-Tu nous enterr'ras tous, pépé... Je disais TU NOUS ENTERR'RAS TOUS, PEPE.
-J'suis pas sourd et j'vous enterr'rai pas: j'vous laisserai tous crever comme des chiens sur le bord de la route!

entre parenthèse

Nous avons mis nos projets
entre parenthèses
et nous n'arrivons plus
à les en sortir

Un modèle sur mesure

Après plusieurs d'années d'économies, de privations, ils se sont enfin achetés un nouveau frigo, un grand frigo avec partie congélateur, le frigo de leurs rêves, l'ancien étant devenu trop petit, il servira pour les enfants. Celui-ci mesure bien deux mètres cinquante de haut. Voire. Autant de profondeur. Voire. Ils l'ont placé dans le garage. Mais pas question de s'en servir pour le moment: le frigo restera vide jusqu'aux vacances d'été. Ainsi en ont-ils décidé. Jusqu'aux premières chaleurs, les grosses chaleurs, jours de congés posés: ils y passeront alors deux semaines à l'intérieur, en amoureux, deux semaines de froid bonheur au milieu d'une banquise de glaçons, d'un lac gelé d'orangina; de quelques poissons panés avec vue sur un énorme bac à oeufs, vide, qui n'est pas sans rappeler les crevasses des glaciers du Mont-Blanc, face Nord. C'est ce qu'on dit.

Boîte de thon branchée

Il a ouvert une boîte
de nuit
en conserve
et quand il a voulu virer les plus grosses miettes
de thon
elles dansaient déjà
poisseuses
sur piste d'huile

Va savoir

On pourrait jeter tout un tas de trucs par la fenêtre, à la poubelle, dans un sac plastique hermétiquement fermé, des choses qui nous concerneraient et ne feraient de mal à personne d'autre, des ressentiments, des doutes, un manque de conviction, une veulerie quotidienne, j'en passe, et on se sentirait peut-être mieux, peut-être vides, l'un et l'autre, à juste regarder les morsures du gel sur tes mains ou les poches sous mes yeux. Va savoir.

Que c'est ainsi, qu'on n'y peut rien

A l'autre bout du fil
une voix lui dit que c'est vraiment l'hiver ici
qu'il fait froid & qu'il neige
qu'on peut à peine sortir
faire les courses
emmener les enfants à l'école
que le chauffage tourne
à plein régime
que le facteur n'apporte plus les lettres
et demande si c'est pareil là-bas
chez lui
si tout va bien
qu'il ne faut pas s'en faire
de toute façon
qu'il y a toujours une solution
quelque part
qu'on en reparlera un autre jour
avant de raccrocher en
l'embrassant

Raymond Carver (1938-1988)




Ca tient à peu de choses

Avec la glace incrustée sur les sols
les maisons glissent lentement
imperceptiblement
d'une rue à l'autre
et, sans un point de repère dans le brouillard,
on s'y perdra, c'est couru d'avance.

Cache-cache


Par jeu, elle se cache sous l'épaisse couche de neige. Garde un oeil ouvert par la vitre de gauche. De l'air de faire coucou, je suis là. Mais personne, ce soir, ne veut jouer avec elle. Les locataires d'en face ont déjà grimpé au dernier étage, calfeutrés, apeurés, espérant que la tempête n'aille pas jusqu'à recouvrir entièrement leur maison. Surtout que les ours sont annoncés dans la région, plus affamés que jamais. Le jeu n'en valait pas la chandelle. Il est maintenant trop tard pour faire marche arrière...

6 janv. 2010

Heureusement, tu es là

Tu es là bien vivante
dans le lit
tu respires
tu ronfles
et tu prends toute
la place

Plus d'ampoule!

l'ampoule de
la lampe de chevet a rendu
l'âme
à la tristesse
des soirs sans teint

Impression

Parfois tu penses comme moi
c'est l'impression que j'ai
quand tu gigottes la tête
d'un fil sur le rétroviseur avant

Aujourd'hui

nous n'avons pas sorti d'argent
n'avons rien acheté
nous nous sommes contentés
du peu qu'il restait
demain sera comme aujourd'hui
& nous savons pourquoi

Si un bruit

Quand il y aura un bruit
déchirant
je saurai que la nuit
est tombée lourdement

Le révèrbère

Le révèrbère devant chez nous
n'éclaire plus vraiment
ça n'empêche pas
les chiens de lui tourner autour

Par précaution

marche dans la neige fraîche
en suivant les pas des autres
cache sous son bonnet
un lapin blanc sur la tête

Scènes de la vie conjugale (Ingmar Bergman - 1973)



Avec Liv Ullmann, Erland Josephson, Bibi Andersson, Gunnel Lindblom...

l'homme de 6 kilos virgule

l'homme de 6 kilos virgule muni de son appareil digestif ouvert comme une huître?
fils de pute
frappa à la porte du plafond dans le bas du dos en zone érogène comme l'air libre irrespirable?
je t'emmerde suis claqué et caetera
quelqu'un que nous ne connaissons ni de Marx ni d'Engels encore moins d'un homme et d'une femme chabadabada?
mais qu'est-ce-qu'une femme sans la tendresse bordel d'un sac
lui ouvrit la voie la gueule à coups de chocolat 100% cacao noisettes sans colorant chimique
un autre lui tendit son sexe sa main l'autre joue à minuit dix-sept et quarante cinq secondes moins
un troisième céda sa place au suivant et disparut dans un tsunami aux larges des Galapagos
avec les tortues les karatékas & une tonne de déchets nucléaires?
à la suite de quoi de qui et d'ornicar ta gueule
moi aussi

on ne retrouva ni sa trace ni ses tresses
l' homme de 6 kilos virgule s'en retourna donc à sa voiture point d'exclamation suite à un attentat kamikase départ dans environ plusieurs morts à peine de quoi se nourrir
! alors je vais me coucher pendant 5 semaines et les soldes?

5 janv. 2010

Librairie

J'entrai dans la librairie et, à l'accueil, je demandai d'une voix timide - un peu gênée - s'il y avait un rayon érotique. Le vendeur me fit oui bien sûr mais me conseilla d'attendre un peu car le rayon érotique était littéralement pris d'assaut et il m'orienta vers un autre rayon plus calme. J'avançai dans la librairie et constatai, surpris, qu'il n'y avait aucun livre sur les étalages. Pas un seul. Uniquement des gens assis par terre, les yeux fermés. Je filai en douce au rayon d'à côté: même topo, pas le moindre bouquin, et toujours des hommes et des femmes le cul sur le sol en train de faire je ne savais quoi les yeux fermés. Je commençai à douter. Etais-je bien dans une librairie? Je retournai voir le vendeur qui aussitôt mit son index sur sa bouche en faisant chuuut il ne faut pas déranger leur concentration toutes ces personnes-là sont en train d'écrire les livres qu'elles ont envie de lire et tournent les pages dans leur tête ah je vois qu'une place se libère au rayon érotique vous pouvez aller l'écrire votre livre, vous aussi, bonne chance.. au fait, vous allez lui donner quel titre?

Disons que... Ah, tu crois?

Ce n'est pas que je sache vraiment...
ni que je ne sache pas... non plus...
mais comment dire... comment faire...
dans ces cas-là on se sent...
pas tout-à-fait... disons... en partie...
A moins qu'un détail fasse que... pas un détail...
une suite de... d'incidences... plutôt je l'ai sur le bout de...
Mais il faudrait vérifier dans le... nan pas à cette page...
La suivante... Oui, c'est ça... et toi ça va ou ça?


(Petit hummm gros clin d'oeil à Hozan K., après avoir lu son jouissif - oui Eric D. a raison de dire jouissif- mi(ni)crobes reçu ce matin)

Au bord du lac, Lee, Carol, l'horizon, le reste

Sur l'herbe éparse
debout
au bord du lac Tamaguchi
Lee
pensif
lance des pierres dans l'eau
compte les ricochets
les poissons volants
les rayons du soleil
dans les yeux
Carol est partie tôt en ville
à pied
démarcher pour un emploi
(elle a perdu au jeu du pile
ou face)
caissière femme de ménage
vendeuse en porte à porte
planteuse de betteraves
n'importe quoi en fait
de quoi tenir quelques jours
comme elle a dit
pas plus car
c'est trop calme par ici

il a répondu
Lee trouve que le ciel
sans réponse pèse
heu pèse sur
ses nuages
heu comme
un corps remonté à la surface
ouais c'est ça, un corps remonté à la surface
et il se demande si
quelqu'un l'a déjà senti de la sorte
avant lui
c'est pas sûr pense t'il c'est pas sûr du tout
et il remet ses mains dans les poches
de son jean
remonte vers la voiture
redresse le siège avant
démarre
pousse le son sur Head Horses
à fond
il chante faux mais il chante
quand même
et de ce qui fut lest de torpeur
il y a cinq minutes encore
s'accommode mieux désormais
de la forme impavide des
horizons sculptés ici
depuis des siècles
des décennies
des semaines
lignes droites
vers la ville ou
Carol l'attend pour
déjeuner au Desiderata's Bar.

Un tueur singulier

Intransigeant
envers ses écrits
à la limite de la tyrannie
insatisfaite
il ne supportait pas
d'en pondre de foireux
Il versait donc
curare
arsenic
ou tout autre poison
sur les mots
entre chaque syllabe
pour que ceux qu'il considérait
comme ses plus mauvais textes
(c'est-à-dire, la plupart)
crèvent dans d'atroces
souffrances
devant ses yeux
haineux.

La réponse est: oui!

Je ne suis pas particulièrement
doué
pour réussir en affaires
est-ce une raison suffisante
pour ne plus en faire de mauvaises ?

depuis des années (5)

John-Paul
reste cloîtré chez lui
dès qu'il le peut
et quand il n'est pas malade
s'invente une maladie
pour justifier sa phobie
du dehors
mais ce n'est pas pour autant
que John-Paul
a une vie intérieure
intense
organisée
Non!
il éprouve même le besoin
de sortir hors de chez lui
dès qu'il le peut
pour oublier sa paresse
du dedans.

Transfigurer l'amas, l'informe

Lancinante parole
d'écrire.
Comme pollen.

Les doigts
serviles
quand la parole
est plus que bruit
diffus.
Comme indigeste.

Je nais chaque fois.
Je meurs pareillement.
Par nécessité,
Sans rien chambouler.

4 janv. 2010

Rhume d'aventure

Sur la table de chevet
un bouquin et
surtout
un paquet de mouchoirs
usés
c'est que j'ai pris froid
en lisant
tales of the far north
de Jack London.

G & Q sont sur un bateau...

Le point G n'existant pas
Trou noir
d'après des chercheurs britanniques *
il va falloir s'en remettre
au point Q.
.
.
.
.
* lu ça dans les infos Google

lentement l'escalier lentement

Il
Monte lentement l'escalier
on entend ses pas
on ne les entend plus
Puis
on entend ses pas
sa respiration
ses pas
sa respiration
Il
tousse
tousse
tousse
gravit les marches une
à une
lentement
très lentement
Il
est encore loin
de chez lui
Mais
quand il regarde
en bas
curieusement
Il
sait qu'il est plus proche
de la fin
que du début.

Il suffit, suffit pas

Il suffit d'un détail
pour que remonte à la surface
un souvenir
.
Il suffit d'un souvenir
pour que remonte à la surface
une certaine tendresse
.
Il suffit de cette tendresse-là
pour que s'installe
le doute

Ceux d'en face

Ceux
dans la maison d'en face
ne sont sans doute pas morts
pas partis en vacances
pas gênés des regards
Non
ils ont juste refermé les volets
tous les volets
de leur petite maison
mais ils ne sont pas encore morts
pas partis en vacances
pas gênés des regards
Non
ils veulent l'obscurité
ils veulent plus qu'ils ne veulent
le temps de réfléchir
aux influences
le temps de s'infléchir
à d'autres influences
le temps de fermer les volets
entre eux & nous

Seul client, seule marchandise

Il entre dans le magasin
vide
il est seul client
seule marchandise
chuinte
cabriole
grotesque
sonne monnaie trébuchante
carillone chéquier
tambourine carte bancaire
s'achète
parts d'actions
compte bloqué
se revend mal
et ne sait plus à qui
il appartient
divisé
code-barres
comme les neiges éternelles
sur le haut du crâne
finira dans un vieux carton
au fond d'un entrepôt
avec les araignées les années creuses
les affamés
c'est comme ça

3 janv. 2010

J'ai écrit un poème, deux poèmes, trois poèmes

J'ai écrit un poème
sur le temps qui passe
le temps a passé tellement vite
j'ai perdu de vue mon poème.
.
J'ai écrit un poème
sur la beauté intérieure
il a fait noir d'un seul coup
j'ai eu peur de mon poème
.
j'ai écrit un poème
sur l'amour la passion
à force de tirer sur la corde sensible
j'ai fini par hair mon poème

Froid + clope + bus

Le regard
posé
sur l'allumette
s'embrase
bleu sombre
nuage


la main hors
de la poche
des yeux
tient la cigarette
en étau

la froid fouille
la nuit
raidit les
heures

une présence
dans le vent
file
hors de portée
du trottoir face

Le bus ne devrait plus tarder plus tarder