16 oct. 2014

Dans la maison de mon enfance (Extrait 17)

Quand on m'a dit que pépé
était mort à l'hôpital
j'ai ressenti un peu de tristesse je crois
mais pas tellement
il était déjà très vieux
depuis longtemps
&
je l'avais finalement assez peu connu
mais c'était pépé quand même
puis on m'a dit que son corps
allait venir à la maison
qu'on allait le veiller pendant
quelques jours
j'ai demandé à maman si on pourrait faire la même chose
avec un hamster
mais elle m'a répondu de ne pas raconter n'importe quoi
&
il a fallu l'embrasser sur le front
c'est la coutume on m'a dit
pépé était allongé dans le lit
de la chambre d'ami
son corps imposant était tout raide
ça me faisait sacrément peur de l'approcher
encore bien plus de devoir l'embrasser sur le front
j'ai regardé maman et papa
j'ai regardé mamy et papy
j'ai regarde mémé et mon frère
j'ai regarde par terre et dans le vide
&
j'ai regardé pépé qui ne bougeait pas
c'était à mon tour de l'embrasser sur le front
à mesure que j'approchais de lui
des idées bizarres me traversaient l'esprit
comme quoi pépé allait subitement se réveiller
et me crier dessus de lui rendre son âme
comme quoi il allait me donner le virus de la mort
et que j'allais mourir moi aussi juste après
j'ai récité très fort une prière dans ma tête
une de ces prières que j'avais apprises au catéchisme
et dont je ne pensais pas devoir un jour me servir
&
j'ai embrassé le front glacé de pépé
du bout des lèvres
&
en fermant les yeux
je ne me sentais pas plus rassuré mais
il a pu être enterré en Bretagne
un peu plus tard

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Même si le sujet est assez "glauque" ce texte est plein d'humour...je le vois bien ce gamin qui a peur d'embrasser son pépé mort. en tout cas moi quand je le lis je peux pas m'empêcher de rire! sorry!

Thierry Roquet a dit…

Je t'ai entendue rire effectivement, en le lisant pour la première fois ;-) C'est une scène véridique (quasiment)...